
Au cours de la vie, il arrive que l’on soit un jour confronté à un accident, une maladie, un handicap ou l’aggravation de celui-ci. Ces aléas peuvent trouver leur origine dans la sphère privée, professionnelle… ou les deux.
Ces situations peuvent engendrer des difficultés dans l’exercice de son poste, voire compromettre son maintien dans l’emploi. Elles peuvent être particulièrement difficiles pour le salarié car elles impliquent souvent un arrêt de travail, synonyme d’isolement.
À cela s’ajoute la nécessité de gérer un état de santé parfois fragile, qui peut évoluer jusqu’à une inaptitude au travail.
Des dispositifs existent aujourd’hui pour accompagner les personnes rencontrant des difficultés professionnelles liées à leur état de santé ou à un handicap afin de les maintenir à leur poste.
Il devient alors essentiel de ne pas subir ces situations, mais de s’y préparer. Le maintien dans l’emploi ne peut plus être une réaction en bout de chaîne, mais doit s’inscrire comme une véritable stratégie à part entière.
Intégrer le maintien dans l'emploi dans sa stratégie d'entreprise dès maintenant
Le maintien dans l’emploi est un enjeu majeur à maitriser pour les employeurs. Il doit être envisagé bien en amont des difficultés, comme une véritable politique de prévention, et non comme une réponse d’urgence à une situation dégradée. Face au risque d’inaptitude, il doit donc être préparé et anticipé dans une logique de long terme.
Aménagement de poste, reclassement, reconversion professionnelle : ces actions demandent du temps, des ressources et la coordination de multiples acteurs. Pour éviter d’intervenir dans la précipitation, il est essentiel de préparer ces situations en les anticipant.
L’employeur a tout intérêt à penser dès maintenant au maintien dans l’emploi, et de préparer une stratégie à intégrer dans sa politique RH en adoptant une approche préventive :
- Identifier les postes à risque
- Analyser les effets à long terme de certains environnements de travail
- Communiquer régulièrement sur les dispositifs existants
- Intégrer les informations clés dans le livret d’accueil ou autre support interne
- Utiliser les dispositifs existants afin de préserver au mieux la carrière et les postes et prévenir les potentielles apparitions ou aggravations de maladies/handicaps.
Pour agir efficacement, il est essentiel que les entreprises adoptent une démarche préventive. Mais cette stratégie nécessite un engagement mutuel entre l’employeur et le salarié.
Le rôle partagé de l'employeur et du salarié

Le maintien dans l’emploi concerne aussi bien le salarié que l’employeur et chacun a son rôle à jouer.
Le rôle de l’employeur est déterminant. Bien souvent en amont de la prise en charge du salarié, il passe essentiellement par de la prévention des risques (prévention primaire) mais aussi par une sensibilité à la discussion et à l’observation de la santé de ses salariés.
Pour développer sa stratégie du maintien dans l’emploi, l’employeur peut :
- Identifier les risques pour agir avant l’apparition de problèmes de santé impactant le poste et anticiper leurs effets effets sur le long terme. Votre Service de Prévention de Santé au Travail peut vous aider et vous accompagner (études de poste, sensibilisation)
- S’assurer de la bonne santé de ses salariés, observer, être à l’écoute de ses salariés, discuter et prendre les devants en demandant une visite médicale si nécessaire (signalement). Chef d’équipe, manager… peuvent être les plus à même de détecter les signes précoces ou non de difficultés, douleurs, plaintes d’un salarié. Identifier ces signes le plus tôt possible et les remonter est essentiel pour la préservation de la santé et du poste du salarié.
- Communiquer à ses salariés des moyens et dispositifs à disposition concernant le maintien dans l’emploi à travers sa communication interne comme le livret d’accueil, des sensibilisations, des newsletters, etc. Visite à la demande, visite de mi-carrière, visite de pré-reprise, rendez-vous de liaison, cellule de prévention de la désinsertion professionnelle, cap emploi, psychologue du travail, tous ces dispositifs rentrent dans le maintien dans l’emploi
Le salarié joue également un rôle essentiel dans la préservation de sa santé au travail.
- Être attentif à sa santé : ne pas minimiser les premiers signes, pour ne pas aller vers leurs aggravation. Consulter et signaler les difficultés (au médecin du travail, à l’employeur ou au médecin traitant) .
- Briser l’isolement : notamment en maintenant un lien avec l’entreprise pendant un arrêt via le rendez-vous de liaison
- Demander un accompagnement adapté : en sollicitant une visite de pré-reprise ou d’autres dispositifs d’aide.
Il est essentiel de rappeler que 80 % des handicaps sont invisibles, ce qui rend d’autant plus importante une communication ouverte et bienveillante au sein de l’entreprise.
Si chacun a une responsabilité, encore faut-il savoir quand et comment intervenir.
Les étapes du maintien dans l'emploi
Ces étapes sont à titre indicatif, et permettent de donner une idée à l’employeur des actions possibles à mettre en place.
1
Informer tous les salariés sur les dispositifs existants dans ses communications
3
Observer et écouter les salariés
2
Déterminer les postes à risques et les salariés concernés.
4
Agir dès les premiers signaux : organiser une visite médicale en cas de doute
5
Maintenir le contact avec le salarié en cas d’arrêt (rdv de liaison)
Ces étapes permettent d’avoir une idée des champs d’action pour l’employeur. Reste à savoir quels dispositifs spécifiques peuvent être mobilisés, en fonction de la situation et du moment.
LES DISPOSITIFS
Les visites
Les visites médicales jouent un rôle central dans le maintien dans l’emploi. Voici les principales à connaître :
La visite à la demande :
Le salarié peut bénéficier à tout moment d’une visite médicale par le médecin du travail. Elle peut être demandée soit par le salarié lui-même, soit par l’employeur ou le médecin du travail.
Dans le cadre du maintien dans l’emploi, cette visite peut être déclenchée soit par l’employeur qui suspecte un problème de santé ou suite à une discussion avec un salarié ayant évoqué une douleur, difficulté ou autre ou par le salarié lui-même. Cette étape constitue souvent une première alerte dans le processus de maintien dans l’emploi, car elle permet d’anticiper la dégradation éventuelle de la situation.
Cette visite ne s’inscrit pas dans le cadre d’un arrêt.
Le rendez-vous de liaison :
Le rendez-vous de liaison est un rendez-vous facultatif (non obligatoire) pour les salariés en arrêt de travail d’une durée d’au moins 30 jours. Il peut être soit à l’initiative de l’employeur soit du salarié.
Ce rendez-vous a un rôle essentiel dans le maintien dans l’emploi. Issu de la loi Santé-Travail, il n’est pas à vocation médicale mais permet d’éviter de perdre contact avec un salarié en arrêt, de l’informer des mesures d’accompagnement mobilisables et préparer son retour dans l’entreprise avec des aménagements de poste ou de temps si nécessaire.
Ce rendez-vous peut être demandé par courrier. Le salarié est également en droit de refuser ce rendez-vous. Il peut être réalisé en présentiel ou fait à distance.
Le salarié qui accepte ou demande ce rendez-vous se voit proposer une date dans les 15 jours par l’employeur.
Le SPST (Service de Prévention et de Santé au Travail) est prévenu par l’employeur 8 jours avant la tenue du rendez-vous de liaison.
La visite de pré-reprise :
La visite de pré-reprise concerne les salariés en arrêt de travail d’au moins 30 jours et n’est pas obligatoire. Elle peut être demandée par le salarié, le médecin traitant, le médecin du travail ou le médecin-conseil de la CPAM.
Cette visite est l’une des plus déterminantes dans le retour à l’emploi. Réalisée pendant l’arrêt de travail, elle permet d’aider le travailleur à reprendre son emploi ou un nouvel emploi compatible avec son état de santé. C’est également un moyen d’anticiper les conditions qui faciliteront un retour à l’emploi ou un éventuel reclassement et préconiser le plus tôt possible d’éventuels aménagements sur le poste de travail.
A l’issue de cette visite le médecin du travail informe l’employeur et le médecin-conseil de ses éventuelles recommandations (sauf opposition du salarié) afin que les mesures soient mises en œuvre en vue de favoriser le maintien dans l’emploi.
La visite de reprise :
La visite de reprise est obligatoire après un congé maternité, un arrêt pour cause de maladie professionnelle, un arrêt d’au moins 30 jours suite à un accident de travail ou un arrêt d’au moins 60 jours suite à un accident ou une maladie non professionnelle.
Cette visite permet de vérifier si le poste de travail que doit reprendre le travailleur ou le poste de reclassement auquel il doit être affecté est compatible avec son état de santé. Mais aussi d’examiner les propositions d’aménagement ou d’adaptation du poste repris par le travailleur ou de reclassement faites par l’employeur à la suite des préconisations émises lors de la visite de pré-reprise et émettre le cas échéant un avis d’aptitude ou d’inaptitude.
L’employeur doit organiser la visite de reprise dès qu’il prend connaissance de la date de fin d’arrêt de travail du salarié. La visite médicale peut être réalisée le jour même de la reprise ou jusqu’à 8 jours après la reprise.
La visite de mi-carrière :
La visite de mi-carrière concerne les salariés qui atteignent l’âge de 45 ans. Cette visite peut être effectuée dans les 2 ans qui précèdent cette date (entre 43 et 45 ans) et est sollicitée par l’employeur.
Cette visite permet de sensibiliser aux enjeux du vieillissement au travail, d’échanger sur son état de santé et son poste de travail et d’envisager ou non la poursuite de sa carrière professionnelle en bonne santé. Mais aussi d’évaluer les risques de désinsertion professionnelle en tenant compte de l’évolution des capacités selon le parcours professionnel, l’âge ou l’état de santé. Les problèmes de santé commencent à apparaître dans cette tranche d’âge, il est donc intéressant pour l’employeur de programmer cette visite afin de faire un bilan.
Suite à ce rendez-vous le médecin peut proposer après échange avec le salarié des mesures d’aménagement de poste ou de temps de travail.
Parmi ces outils, certains sont mobilisés dans des situations critiques où le risque de désinsertion professionnelle est élevé. C’est là qu’intervient un dispositif essentiel : la cellule PDP
La cellule PDP

La cellule de Prévention de la Désinsertion Professionnelle intervient pour les situations où le maintien dans l’emploi est clairement compromis. Elle mobilise une équipe pluridisciplinaire pour construire une réponse personnalisée et rapide.
Mais attention : ce dispositif s’adresse à des situations déjà avancées. D’où l’importance d’intervenir en amont pour éviter d’avoir à en arriver là.
L'essai encadré
L’essai encadré est un dispositif pour les salariés en arrêt de travail total ou partiel indemnisé par la CPAM et présentant un risque désinsertion professionnelle à cause de son état de santé.
L’objet de l’essai encadré est d’évaluer pendant 14 jours renouvelables 1 fois (dans la limite de 28 jours), la compatibilité d’un poste de travail avec l’état de santé du salarié.

L’essai encadré est un dispositif pour les salariés en arrêt de travail total ou partiel indemnisé par la CPAM et présentant un risque désinsertion professionnelle à cause de son état de santé.
L’objet de l’essai encadré est d’évaluer pendant 14 jours renouvelables 1 fois (dans la limite de 28 jours), la compatibilité d’un poste de travail avec l’état de santé du salarié.
Le dispositif permettra de :
- Tester la capacité du salarié à reprendre son ancien poste
- Tester un aménagement de poste
- Tester un nouveau poste de travail
- Préparer une reconversion professionnelle
L’essai encadré peut, par exemple, permettre de tester une reprise à temps partiel thérapeutique ou la mise en place d’un contrat de rééducation professionnelle.
NB : Le statut du salarié ne change pas pendant l’essai encadré : comme pour tout arrêt de travail indemnisé, le contrat de travail est suspendu. Le salarié continue de percevoir ses indemnités journalières CPAM.
L’essai encadré peut être initié soit suite à la demande du salarié ou alors lui être proposé par :
- Les services de prévention et de santé au travail ;
- Le service social de l’Assurance maladie ;
- Un organisme de placement spécialisé dans l’accompagnement ou le maintien en emploi des personnes handicapées (Cap emploi, Comète France…).
La demande peut être adressée à la CPAM soit directement par le salarié si il est à l’origine de la demande, soit par l’intermédiaire du service qui l’accompagne (Cap emploi, service social de l’Assurance maladie…).
Pour que le dispositif soit mis en place, l’accord de 3 médecins est nécessaire : médecin du travail, médecin-conseil CPAM et médecin traitant. En outre, une visite médicale doit être réalisée par le médecin du travail de l’entreprise d’accueil ou à défaut par celui de l’entreprise d’origine.
Pendant l’essai, le salarié est suivi par un tuteur au sein de l’entreprise d’accueil afin de valider la compatibilité entre le poste de travail et les capacités physiques du salarié.
Un bilan doit être rédigé par le tuteur à l’issue de l’essai encadré. Ce document est ensuite transmis au médecin du travail, à l’Assurance maladie et selon les cas à d’autres organismes impliqués dans le processus.
Le maintien dans l’emploi est une démarche qui se pense et se construit sur le long terme. Plusieurs dispositifs sont à disposition afin de prévenir au maximum la désinsertion professionnelle face à un risque d’inaptitude. Il ne doit pas être perçu comme une réponse ponctuelle à un problème isolé, mais comme une démarche durable, au service de la santé, de la performance et de la responsabilité sociale de l’entreprise.